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labeurs, par nos fatigues de tous les jours ; puis, au moment de l’ouverture de la succession, les enfants sortis jeunes de la maison paternelle viendront prendre leur part dans le résultat de notre travail. Travaillons pour notre compte, ayant un pécule particulier auquel nos frères émigrés ne mordront pas ; puis nous aurons notre part dans l’hoirie commune. — Ce raisonnement a été fait et pratiqué aussitôt après la promulgation des lois françaises. Ces fâcheux résultats se produisent déjà et augmenteront plus tard ; car les nombreuses donations faites sous la loi sarde, en 1860, ont prorogé les bénéfices de ces dispositions pour beaucoup de familles. Il est fort possible qu’en théorie la combinaison de l’article 913 soit très-ingénieuse ; il pouvait même arriver qu’elle soit très-appropriée aux conditions des familles adonnées aux professions libérales ; mais ici, en Savoie, au milieu de la transition d’une loi à l’autre, nous avons surpris le fait brutal, la vérité aveuglante résumée en deux mots : La diminution de la portion disponible a fait émigrer dans les villes les jeunes cultivateurs. » (Extrait du Courrier des Alpes, Journal de Chambéry, avril 1867.)

Il est utile de rapprocher de cet article un travail que je publiai, en 1867 (avant l’annexion), sur le régime des successions en Savoie. (Les Ouvriers des deux Mondes, t. II, p.52.) Au surplus, le raisonnement du Journal de Chambéry est précisément celui que fit en vain l’illustre Portalis, lors de la discussion du Code civil (L, 6). Mais l’intérêt évident des familles rurales ne put alors prévaloir