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Université ; elles établissaient dans chaque région au moins deux universités rivales[1], et elles assuraient ainsi, sans aucune intervention des pouvoirs publics, le perfectionnement des méthodes d’enseignement et le contrôle des doctrines. Souvent aussi l’émulation salutaire des universités laïques était fortifiée par l’intervention des corporations religieuses[2]. La révolution française en détruisant nos libres universités provinciales, le premier empire en créant le monopole d’une Université de l’État, ont rompu à la fois avec la tradition nationale et avec la coutume de tous les peuples civilisés. Dans un temps où les principes fondamentaux sont ébranlés, où les doctrines les plus insensées réclament le droit de se produire, le régime actuel soulève contre la paix publique des dangers qu’aucune sagesse humaine ne saurait conjurer. Malgré d’admirables efforts

  1. C’est sous cette influence que prospérèrent simultanément : en Angleterre, Cambridge et Oxford ; dans la basse Écosse, Édimbourg et Glasgow ; dans la haute Écosse, Saint-Andrews et Aberdeen ; dans le Languedoc, Toulouse et Montpellier ; en Saxe, Leipzig, Halle et Wittemberg, etc.
  2. En France, la concurrence opposée à nos 23 universités vint surtout des franciscains, des dominicains et des jésuites. Jusqu’à la révolution, la nécessité de ce régime fut hautement appréciée. Le cardinal de Richelieu l’a signalée dans les termes suivants : « Puisque la foiblesse de notre condition humaine requiert un contre-poids en toutes choses, il est plus raisonnable que les universitez et les jésuites enseignent à l’envi, afin que l’émulation aiguise leur vertu. » (Testament politique, I, II, 41.)