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est plus efficace que la contrainte légale qui, sous le précédent régime, est exercée par les gouvernants et les Autorités sociales. En appelant cette organisation sociale régime de liberté, je me conforme à l’usage et à la préoccupation dominante de mes concitoyens, plutôt que je n’exprime la vraie nature de l’institution. Plusieurs peuples de l’Occident se proposent d’atteindre, sous ce nom trompeur (§ 57), par la voie des révolutions, un idéal dont ils s’éloignent sans cesse. Au contraire, les peuples, grands ou petits, riches ou pauvres, qui s’en rapprochent le plus sont précisément ceux qui emploient le moins, dans leurs programmes politiques, le mot liberté. J’ai souvent fait cette remarque en Angleterre[1] et en Biscaye[2], c’est-à-dire chez les deux peuples où la prospérité est le mieux établie, en même temps que la contrainte morale a le plus d’empire.

Au surplus, les moyens propres aux deux régimes diffèrent moins que ne le supposent ceux qui réclament avec bruit certaines formes, plutôt que le fond même, de la liberté. Pour se convaincre de cette vérité, il suffit de comparer, chez les divers peuples, l’état de la religion, c’est-à-dire le trait le plus important de leur organisation sociale.

  1. La Réforme sociale, t. III, p. 239.
  2. Bulletin de la Société d’économie sociale, t. II, p. 269.