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social, par les souverains les plus perspicaces[1]. En ce moment enfin, nos gouvernants la mettent à profit avec une activité fiévreuse, pour regagner l’avance qu’ils avaient laissé prendre aux peuples rivaux, en ce qui touche la fabrication des armes de guerre.

L’imitation appliquée au choix des armes s’est toujours imposée aux peuples comme une nécessité évidente. Il ne serait pas moins nécessaire aujourd’hui d’étendre ce même procédé à la réforme du travail, au perfectionnement des mœurs et à l’amélioration du système de gouvernement. Malheureusement mes concitoyens ne sont guère portés à se servir de ce moyen de salut[2]. Ils ignorent pour la plupart

  1. « Vous sçavez bien le désir que j’ay de donner ordre au fait de la justice et de la police du royaume, et pour ce faire il est besoin d’avoir la manière et les coutumes des autres pays. » (Lettre du 5 août 1479, de Louis XI au baron du Bouchage.)
  2. Je conseillais, il y a dix ans (Réforme sociale, t. III, p.23), de donner aux jeunes auditeurs sortant du conseil d’État la mission d’étudier sur place et de décrire méthodiquement les diverses constitutions sociales de l’Europe. Si ce conseil avait été suivi, nous jouirions de plusieurs avantages qui nous font défaut en ce moment : au milieu de l’agitation qui se reproduit en faveur d’un nouveau système de gouvernement, nous aurions des guides plus sûrs que la passion des opposants ou l’égoïsme des satisfaits ; nous aurions un corps de jeunes hommes animés d’énergiques convictions, et préparés à restaurer le règne du bien ; enfin, nous ne verrions pas ces mêmes hommes, rejetés dans la vie privée, s’égarer en fondant le succès d’une nouvelle carrière sur la propagation de principes qui ne sont pas suffisamment justifiés par l’expérience.