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maintenir forts et prospères. Elle constituait chez les Romains[1] un principe de gouvernement. Elle était chez les Grecs d’un usage encore plus habituel ; elle fut même enseignée par Socrate avec une précision à laquelle les modernes ne sauraient rien ajouter[2]. La réforme par l’imitation a été également appliquée au gouvernement de la France, sous l’ancien régime

  1. « Rome accrut beaucoup ses forces par son union avec les Sabins, peuples durs et belliqueux comme les Lacédémoniens, dont ils étaient descendus. Romulus prit leur bouclier, qui était large, au lieu du petit bouclier argien dont il s’était servi jusqu’alors. Et on doit remarquer que ce qui a le plus contribué à rendre les Romains les maîtres du monde, c’est qu’ayant combattu successivement contre tous les peuples, ils ont toujours renoncé à leurs usages sitôt qu’ils en ont trouvé de meilleurs. » (Montesquieu, Grandeur et Décadence des Romains, ch. 1er.)
  2. Xénophon résume ainsi, dans un dialogue entre Socrate et Périclès, les causes de la décadence d’Athènes et les moyens de réforme. « Alors Périclès : Je m’étonne, Socrate, que notre ville ait ainsi décliné. — Pour moi, je pense, reprit Socrate, que de même qu’on voit certains athlètes, qui l’emportent de beaucoup sur d’autres par la supériorité de leurs forces, s’abandonner à la nonchalance et descendre au-dessous de leurs adversaires, de même les Athéniens, se sentant supérieurs aux autres peuples, se sont négligés et ont dégénéré. — Et maintenant, que pourraient-ils faire pour recouvrer leur ancienne vertu ? — Alors Socrate : Il n’y a point ici de mystère ; il faut qu’ils reprennent les mœurs de leurs ancêtres, qu’ils n’y soient pas moins attachés qu’eux, et alors ils ne seront pas moins vaillants. Sinon, qu’ils imitent du moins les peuples qui commandent aujourd’hui, qu’ils adoptent leurs institutions, qu’ils s’y attachent de même, et ils cesseront de leur être inférieurs ; qu’ils aient plus d’émulation, ils les auront bientôt surpassés. » (Mémoires sur Socrate, liv. III, chap. v.)