Page:Le Play, L’Organisation Du Travail, 1893.djvu/386

Cette page a été validée par deux contributeurs.

couleur ; la vénalité des gouvernants élus par le suffrage direct des citoyens[1] ; l’impuissance de ces mêmes gouvernants à réprimer, chez beaucoup de fonctionnaires, les désordres les plus scandaleux[2] ; les prétentions choquantes à l’égard des étrangers, et les entreprises des flibustiers. Ces désordres ont eu pour contre-coup le développement de l’antagonisme entre les classes extrêmes de la société, les partis politiques et les États de l’Union ; ils ont détruit presque partout les hiérarchies locales fondées sur la richesse, le talent et la vertu[3] ; enfin ils ont eu pour conclu-

  1. De meilleurs choix paraissent être faits par l’élection à deux degrés. Les présidents de l’Union, nommés par ce dernier moyen, ont été généralement à la hauteur de leur charge.
  2. M. Walker, publiciste des États-Unis et commissaire des banques de la Nouvelle-Angleterre, a cité récemment des faits de corruption qui sont devenus usuels en son pays et qui, jusqu’à ce jour, restent sans exemple dans notre Occident. Il signale, en particulier, le service de l’impôt sur les spiritueux, dont le produit, à raison de l’improbité des percepteurs, est réduit, pour une année, de 80 millions à 13 millions de dollars. (Journal des économistes, octobre 1869, p. 131.)
  3. « Tandis que les instincts naturels de la démocratie portent le peuple à écarter les hommes distingués du pouvoir, un instinct non moins fort porte ceux-ci à s’éloigner de la carrière politique, où il leur est si difficile de rester complètement eux-mêmes et de marcher sans s’avilir. » (A. de Tocqueville, de la Démocratie en Amérique, t. Ier, chap. XIII.) — L’énoncé de ce fait est contradictoire avec l’opinion du même auteur (note 12), touchant l’avènement fatal de la démocratie en Europe. Il est évident, en effet, que les peuples ne sauraient prospérer qu’en attribuant l’influence au talent et à la vertu.