sentiments qui unissaient autrefois le riche au pauvre et le maître au serviteur[1].
Ces propensions invétérées vers l’inégalité ne sauraient être modifiées, comme l’espèrent quelques-uns, par l’action prolongée d’un régime dit démocratique (§ 60), qui substituerait par la contrainte, aux classes dirigeantes actuelles, de nouvelles individualités sorties des derniers rangs de la société. Chacun sait, en effet, que ceux qui commencent à s’élever traitent leurs égaux de la veille avec une dureté toujours rare chez les personnes placées, dès leur naissance, dans une situation élevée. Ce vice des parvenus est vivement senti de ceux qui sont restés aux derniers rangs ; il contribue plus qu’on ne croit à maintenir l’harmonie entre les pauvres et ceux qui ont joui, dès leur naissance, des avantages de la richesse. En constatant ces dispositions naturelles du cœur humain, on comprend que la réforme sociale ne se trouvera pas dans les institutions qui violent la liberté pour détruire les inégalités établies par la nature ou créées par le travail des aïeux.
Ainsi la proclamation incessante du prétendu principe de l’égalité ne s’accorde pas plus avec la raison et l’expérience qu’avec l’état actuel de nos mœurs. Les efforts qui se font de loin en
- ↑ La Réforme sociale, t. Ier, p. 48 ; t. II. p. 74.