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le dévouement qui les anime ; si elles abusaient de leur influence sur une jeunesse inexpérimentée, devenue, par son éducation même, étrangère aux affections du foyer et aux intérêts de l’atelier, elles exerceraient à coup sûr les captations qu’on se flatte en vain d’éviter. Seulement ces captations seraient exercées, sans contrôle possible, sur des jeunes gens, au lieu de l’être, sous le contrôle des magistrats, sur les chefs de famille. Or les auteurs de l’objection croient que les corporations ne reculent devant aucun moyen pour accaparer les riches successions. Ils se montrent donc fort inconséquents en accordant leur préférence au régime qui se prête le mieux à ce genre d’abus. Comment n’ont-ils pas compris que les sociétés libres déjouent précisément, par la liberté testamentaire, les manœuvres qu’ils redoutent ?

Dans les familles riches adonnées au vice et à l’oisiveté, on a vu parfois le testament donner une scandaleuse destination à la fortune créée par les ancêtres ; mais c’est un des désordres que ne saurait conjurer la meilleure constitution sociale ; et il faut reconnaître d’ailleurs que la désorganisation de telles familles n’est pas un mal sans compensation. Au contraire, ce scandale n’est jamais donné par les chefs de famille voués au travail ; car la préoccupation de toute leur vie est de lier la possession