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issus d’un même mariage ont tous un droit égal à l’affection de leurs parents. Les Anglo-Saxons repoussent unanimement cette théorie : ils pensent, au contraire, que les saines notions de la loi naturelle, fondées sur la raison et confirmées par la pratique des peuples prospères, subordonnent le droit des enfants à la libre volonté du père exprimée par le testament.

Selon la raison, l’origine naturelle de toute propriété est le travail fécondé par l’épargne. Le propriétaire dispose souverainement de la chose qu’il a créée : il l’emploie sans restriction pour tout usage à sa convenance ; il la transmet avec la même liberté à un autre propriétaire, s’il n’a pas jugé opportun de la consommer ou de la donner de son vivant. Ce droit naturel subsiste alors que le propriétaire devient père de famille. La loi ne doit le restreindre en rien, sauf dans le cas où les enfants tomberaient à la charge de la société. Le droit de réglementer la propriété privée naît, dans ce cas, de l’atteinte portée à l’intérêt public[1].

Les Anglo-Saxons s’intéressent peu, au surplus, aux discussions sans fin que soulèvent les principes de droit naturel ; mais ils s’assurent que

  1. Montesquieu adopte la même opinion, et la résume en ces termes : « La loi naturelle ordonne aux pères de nourrir leurs enfants ; mais elle ne les oblige pas de les faire héritiers. » (Esprit des loix, XXVI, 6.)