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crainte des maux qui en peuvent résulter pour l’avenir, se condamneraient à une perpétuelle infériorité. Il ne faut pas seulement examiner si un clergé peut se corrompre un jour ; il faut également se demander s’il est un moyen indispensable de perfectionnement, lorsqu’il possède les vertus de sa profession. Or cette dernière question est résolue affirmativement par l’histoire, comme par l’état actuel des sociétés.

Plusieurs sectes chrétiennes ont tenté, à l’imitation des patriarches de la Bible, de conserver l’ordre moral par le sacerdoce spontané des pères de famille. Les membres de la société des Amis[1] ont résolu ce problème depuis trois siècles avec un dévouement et un succès qu’on ne saurait trop admirer. Ils ont réussi, en effet, à se préserver de la corruption propagée ailleurs, dans le même laps de temps, par certains clergés. Mais, au milieu de ces succès, les Amis eux-mêmes ne se méprennent pas sur le rôle modeste qu’ils remplissent en présence des autres cultes. Malgré tous leurs efforts, ils sont restés dans le christianisme à l’état d’exception. Les Amis ne sont représentés en France et sur le Continent que par quelques familles. En Angleterre et aux États-Unis, où ils se sont particulièrement mul-

  1. Les Amis sont habituellement désignés sous le nom de Quakers. Voir la description de cette société (Réforme sociale, 3e édition, t. Ier, p. 131).