Page:Le Play, L’Organisation Du Travail, 1893.djvu/248

Cette page a été validée par deux contributeurs.

prendre les philosophes de l’antiquité[1]. En résumé, la science, cette lumière souveraine des nations modernes, est autorisée à nier Dieu et la religion. Cette conclusion est d’ailleurs justifiée par la pratique des peuples célèbres, qui deviennent d’autant moins religieux qu’ils sont plus savants. Les efforts qu’on veut faire pour revenir à la religion iraient donc à l’inverse du mouvement réel des sociétés.

J’oppose à cette doctrine les réponses suivantes.

On viole les plus évidentes règles de la méthode d’observation en jugeant, et à plus forte raison en niant, au nom des sciences physiques, des phénomènes qui appartiennent exclusivement au domaine de la science sociale. On prétend soumettre l’humanité à l’autorité de sciences fort secondaires et qui, par ce motif, ne se sont constituées que de nos jours. On regarde, au contraire, comme non avenue la connaissance de l’homme moral et religieux, cette science par excellence[2], qui, depuis les premiers âges de l’humanité, a occupé les plus grands esprits et

  1. Des doctrines semblables ont été enseignées de tout temps, et en partie même par les plus anciens philosophes grecs ou indous ; mais elles manquaient de base, et ce n’est que par le progrès des sciences naturelles qu’elles ont trouvé cette base. (Ibidem, préface, p. v.)
  2. Le scepticisme scientifique est inspiré par l’orgueil humain, en révolte contre l’autorité divine : cependant, comme le rappelle une note suivante (n. 11), il tend, par son principe même, à ne voir dans l’homme que