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À la première époque (§ 15), par exemple, les dissidences religieuses provoquées par un clergé corrompu avaient amené notre pays aux derniers degrés de la souffrance. La religion, qui, à l’époque précédente, rapprochait les hommes (§ 14), était devenue le principal moyen de les diviser. Les discordes religieuses, fournissant de nouveaux aliments aux dissensions civiles, engendraient partout l’assassinat, la guerre, le pillage et le massacre. Dévastée par la violence, dégradée par la haine, la France, lors de l’assassinat du dernier Valois (1589), avait perdu à la fois le bien-être matériel et le sens moral. Beaucoup de gens de bien furent alors conduits à enseigner qu’il serait utile de détruire dans les cœurs les croyances qui étaient la cause ou le prétexte de ces calamités ; Montaigne et Charron (§15) se firent les interprètes de ce sentiment, et le propagèrent au sein des classes dirigeantes. Mais lorsque le génie de Henri iv (1598) et celui de Richelieu (1629) eurent rétabli les bonnes mœurs dans le clergé et la paix religieuse dans la nation, les propagateurs de ce scepticisme social se trouvèrent désintéressés ; les croyances reprirent possession de l’empire qui leur appartient[1] ; et l’on vit briller aussitôt

  1. « C’est par une espèce d’aberration de l’intelligence, et à l’aide d’une sorte de violence morale exercée sur leur propre nature, que les hommes s’éloignent des croyances religieuses ;