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incline aisément à l’orgueil. Il se considère alors volontiers comme l’unique cause des succès que ses ancêtres croyaient devoir surtout à la bonté divine. Mais, loin de se fortifier par cette usurpation, les esprits sont bientôt frappés dans le principe même de leur force. Ils se soutiennent momentanément par l’exemple de ceux qui reportent tout à Dieu : mais ce stimulant disparaît à mesure que le mal s’étend ; puis la décadence survient en même temps que l’ordre moral s’amoindrit.

Lorsque les appétits physiques ne sont plus contenus par la loi morale, l’entraînement des sens accroît singulièrement le désordre produit par les égarements de l’esprit. La grossièreté des habitudes révèle en quelque sorte aux yeux les aberrations de la pensée. Sous cette influence, on a vu parfois une société délicate se laisser envahir, pendant le cours d’une génération, par les désordres les plus scandaleux (§ 17).

Ces deux formes de la corruption se développent chez les gouvernants plus rapidement que chez les autres classes. Dans ce milieu, elles ont pour conséquence, tantôt l’exagération et tantôt le relâchement de l’autorité. Toujours elles provoquent chez les gouvernés l’oubli des sentiments d’affection et de respect, qui sont les plus solides soutiens de la hiérarchie sociale. L’amoindrissement du principe d’autorité devient, à son tour, l’origine d’une foule de désordres sociaux.