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On pourrait, à première vue, expliquer simplement par une cause économique le bien-être relatif des populations qui possèdent en permanence leur foyer ; et il leur est, en effet, fort doux de n’avoir point à prélever un prix de location sur leurs salaires ou leurs bénéfices. Toutefois un examen plus attentif montre bientôt que ce bien-être résulte surtout d’un ensemble de causes morales. À cet égard, toute la population est convaincue que l’acquisition préalable du foyer est un devoir impérieux pour toute famille nouvelle qui prétend à la considération de ses pairs. Les parents se préoccupent constamment d’assurer, autant qu’il dépend d’eux, cet avantage aux enfants qui ne doivent pas se fixer dans la maison paternelle. Les patrons montrent la même sollicitude à l’égard des nouvelles familles qui désirent s’attacher à leurs ateliers. Mais ce sont surtout les femmes qui, aux époques de prospé-

    leur imprévoyance actuelle que par les contraintes du partage forcé (n. 3). Des corporations de bien public, librement constituées, sans immixtion des pouvoirs publics (§ 67), en vue d’épargner à leur localité les souffrances physiques et morales du régime des locations, réuniraient bientôt des millions, sous forme de dons et legs, si chaque homme de bien enrichi par le travail avait le pouvoir de rattacher à une telle œuvre le souvenir de son nom et les devoirs de sa postérité. Dès le premier voyage que j’ai fait comme élève de l’École des mines, j’ai compris le bienfait de ces institutions ; car j’ai pu admirer, dans le Hartz hanovrien, la coutume bienfaisante qui aide les ouvriers des mines à acquérir et à conserver la propriété du foyer domestique. (Les Ouvriers européens, p. 36 et 140.)