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L’épargne pourvoit ainsi à deux convenances également impérieuses dans une bonne organisation sociale. Elle ouvre toutes les carrières désirables à la population surabondante, qui ne peut trouver emploi dans l’atelier où travaillaient les ancêtres. Elle conserve, sans aucune perturbation, des coutumes qui assurent le bien-être des générations successives et qui constituent, dans leur ensemble, les plus solides fondements de la nationalité.

L’épargne des patrons et celle des ouvriers sont également nécessaires aux nations prospères, soit pour favoriser dans les colonies l’expansion de la race, soit pour conserver ou développer chez les familles de la métropole le bien-être acquis par les générations antérieures. Cette bienfaisante pratique féconde toutes les autres. Elle a fait pendant des siècles la grandeur de la France ; et elle assure aujourd’hui la prépondérance aux nations qui sont restées fidèles à la Coutume des ateliers européens. Quand on remonte à l’origine des grands hommes qui, dans les derniers siècles, ont jeté un si grand éclat sur le nom français, on arrive bientôt à quelque famille modeste qui s’est élevée lentement par l’épargne. Tout en conservant son rang aux degrés moyens ou inférieurs de la hiérarchie, cette famille a pu mettre en relief, par un judicieux emploi de son épargne, les facultés éminentes