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Continent, les sources de chaleur et de force motrice nécessaires aux ateliers. La séparation des deux sortes de travaux s’y trouve commandée à la fois par l’excessive agglomération qui prive les habitations de toute dépendance rurale, et par la fausse science qui subordonne les lois sociales aux lois économiques (§ 29). Imbus de cette doctrine, beaucoup de patrons se flattent d’étendre jusqu’aux plus extrêmes limites les bienfaits de la division du travail ; et, à ce point de vue, ils interdisent absolument aux familles de leurs ouvriers toute occupation étrangère au travail de la manufacture[1]. En comparant certains groupes concurrents du Continent et de l’Angleterre qui ont fait l’objet de mes études spéciales, j’ai souvent constaté que cette pratique n’était pas mieux justifiée par la prospérité de la manufacture que par la stabilité de l’ordre social. Cette remarque s’applique notamment aux fabriques de coutellerie ou de quincaillerie de l’Angleterre[2], de l’Allemagne[3] et de la France[4].

  1. Beaucoup de manufacturiers anglais déclarent en principe que l’ouvrier doit concentrer toute sa pensée sur sa profession. Comme application de cette doctrine, j’ai vu congédier un excellent ouvrier qui faisait son devoir à l’atelier avec une régularité exemplaire, mais qui avait commis la faute de créer au logis un petit commerce d’épicerie, exploité par sa femme et ses filles.
  2. Les Ouvriers européens, XXII, XXIII.
  3. Ibidem, XVI.
  4. Document (0) ; Prix ; fabrique de Zornhoff (Bas-Rhin).