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Depuis les réformes opérées en Autriche (1849) et en Russie (1861), le régime de contrainte (§ 8) ne s’emploie plus guère en Europe pour assurer la permanence des engagements. Dans toutes les localités de l’Orient[1] où je l’ai observé pendant vingt années, le régime des engagements forcés obligeait les deux parties, selon les prescriptions de Coutumes très-variées. Cependant les Coutumes offraient toutes ce caractère, que les patrons de l’Occident les auraient repoussées comme onéreuses pour leurs propres intérêts. Ce régime n’avait donc aucun rapport avec l’idée que soulève généralement, en France, le mot de servage. Au surplus, dans les modèles d’organisation sociale que l’Europe compte par milliers, la permanence des engagements se fonde exclusivement sur le libre accord des intéressés.

    ni aux individus éminents qui peuvent prospérer par leurs propres efforts. Elles répondent seulement aux convenances de cette catégorie restreinte d’ouvriers qui, par leur bonne conduite, se prêtent aux exigences du travail en commun, sans avoir l’initiative que réclame le succès sous le régime individuel. D’ailleurs la réussite exceptionnelle de certaines communautés n’a guère été obtenue que dans des entreprises locales qui n’ont point à lutter contre la concurrence des industries étrangères. Les novateurs, qui prétendent soutenir cette lutte en revenant aux communautés du moyen âge, commettent une erreur aussi dangereuse que ceux qui se flatteraient de faire une guerre heureuse avec les armes de jet de la même époque.

  1. Les Ouvriers européens : Paysans à corvées d’Orembourg, paysans à l’Abrok de l’Oka, forgeron de l’Oural, charpentier de l’Oural, forgeron de Samakowa, paysans de la Theiss, mineur de la Carniole.