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§ 18

LES SYMPTÔMES D’UNE PROCHAINE RÉFORME.

Beaucoup d’hommes qui acceptent les faits et les principes exposés ci-dessus, ont cependant perdu, en ce qui touche la réforme, toute confiance en l’avenir. Ceux qui mettaient leur espoir dans certaines formes de gouvernement (§ 61), se découragent chaque fois qu’ils constatent l’impuissance de leur procédé favori. Ceux qui croient à la chute fatale de certaines nations voient dans nos catastrophes réitérées une nouvelle vérification de leur fausse théorie. Les uns et les autres se persuadent de plus en plus que les Français sont désormais incapables de remonter le courant[1] qui, depuis deux siècles, les

  1. J’ai démontré, dans la Réforme sociale (t. Ier, p. 23), la fausseté de cette formule de découragement. Il serait plus que jamais nécessaire que les vrais patriotes, sans distinction de parti, se concertassent pour la combattre. Une enquête personnelle faite depuis la promulgation du sénatus-consulte de septembre 1869, avec le concours d’amis dévoués au bien, me signale un surcroît de découragement. Deux traits sont particulièrement indiqués. Beaucoup d’hommes indépendants par situation et par caractère, chargés à titre gratuit du gouvernement local (§ 68), croient que le régime de contrainte légale (§ 8) était un contrepoids nécessaire à l’influence perturbatrice conférée par le système électoral actuel aux cabaretiers urbains ou ruraux et à leurs innombrables clientèles. Les honnêtes gens étrangers à la vie publique ont perdu l’habitude de toute initiative. Effrayés par le mot liberté, ils ne comprennent pas que la réforme n’est que le retour à la contrainte morale de la grande époque de pros-