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les peuples avaient enrichis, par les rois et les légistes que l’opinion avait grandis pour tempérer les abus de la féodalité.

L’Église romaine, qui pendant neuf siècles avait été l’exemple du monde, devint peu à peu l’un des foyers de la contagion[1]. Ses désordres

  1. « Saint Bernard, dit Bossuet, a gémi toute sa vie des maux de l’Église. Il n’a cessé d’en avertir les peuples, le clergé, les évêques, les papes même. L’Église romaine, qui, durant neuf siècles entiers, en observant avec une exactitude exemplaire la discipline ecclésiastique, la maintenait de toute sa force par tout l’univers, n’était pas exempte de mal ; et, dès le concile de Vienne, un grand évêque, chargé par le pape de préparer les matières qui devaient y être traitées, disait qu’il fallait réformer l’Église dans le chef et dans les membres. Le grand schisme arrivé un peu après mit plus que jamais cette parole à la bouche, non-seulement des docteurs particuliers, d’un Gerson, d’un Pierre d’Ailly, des autres grands hommes de ce temps-là, mais encore des conciles ; et tout en est plein dans les conciles de Pise et de Constance. On sait ce qui arriva dans le concile de Bàle, où la réformation fut malheureusement éludée. Le cardinal Julien représentait à Eugène iv les désordres du clergé, principalement celui d’Allemagne. Le clergé, disait-il, est incorrigible et ne veut point apporter de remède à ses désordres. On se jettera sur nous, quand on n’aura plus aucune espérance de notre correction. Les esprits des hommes sont en attente de ce qu’on fera, et ils semblent devoir bientôt enfanter quelque chose de tragique. Bientôt ils croiront faire à Dieu un sacrifice agréable en maltraitant ou en dépouillant les ecclésiastiques, comme des gens odieux à Dieu et aux hommes, et plongés dans la dernière extrémité du mal. Le peu qui reste de dévotion envers l’ordre sacré achèvera de se perdre. On rejettera la faute de tous ces désordres sur la cour de Rome, qu’on regardera comme la cause de tous les maux, parce qu’elle aura négligé d’apporter le remède nécessaire. Saint Bernard, continue Bossuet, constate que l’Église peut dire avec Isaïe que son