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trouver au foyer paternel les souvenirs de la première enfance[1].

Cette organisation de la famille est plus apte que les deux autres à mettre en lumière les grands talents. Sous ce rapport, l’intérêt de la famille se lie étroitement à ceux de la commune, de la province et de l’État. Cette aptitude existe dans toutes les classes de la société. Elle se manifeste surtout à ces niveaux inférieurs de la hiérarchie sociale où la tendance au mal est plus qu’ailleurs conjurée par la nécessité d’une existence frugale et d’un travail opiniâtre. De nombreux exemples enseignent que la meilleure chance de fortune pour une famille de petits propriétaires est la culture des intelligences qui naissent dans son sein. Encouragés par les notables du lieu, les membres de ces modestes communautés s’efforcent toujours de pousser dans le

  1. Chaque année on voit arriver en Angleterre une foule d’anciens émigrants qui, après s’être enrichis dans les colonies, tiennent à revoir les lieux où s’est passée leur enfance. Ils quittent momentanément leurs somptueux établissements pour venir avec leurs enfants célébrer les fêtes de Noël dans la modeste maison où ils sont nés. Le même phénomène se reproduit dans les provinces basques et dans les hautes Alpes de la Suisse, de l’Italie et du Tyrol. Les émigrants de ces dernières régions répugnent généralement à se fixer dans les pays étrangers où ils se sont enrichis, et ils reviennent avec leur fortune fonder un établissement au lieu natal. C’est ainsi que s’élèvent des villages prospères dans les régions alpestres, qui ne seraient habités que par des chamois si elles n’étaient pas fécondées par les sentiments que crée la famille-souche.