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domaine et à assurer à ses enfants un foyer qui reste leur centre commun[1] ?

Un écrivain constatant les progrès de la stérilité systématique n’était-il pas en droit de dire « C’est à ce monstrueux résultat que nous a conduits le Code civil et ne dirait-on pas qu’il l’a fait avec préméditation, quand on considère que la loi contient une prescription diminuant la quotité disponible à mesure que le nombre des enfants devient plus grand ? Plus un père a d’enfants, plus la loi est sévère pour lui. On ne peut engager plus directement à réduire les familles[2]. »

Dans les familles fécondes, la conservation du foyer importe à tous les membres, à ceux qui forment des établissements particuliers ou qui émigrent, non moins qu’à celui que le père de famille s’associe comme héritier. En cas d’échec

  1. Un exemple fera saisir combien la préoccupation de l’égalité est vaine, même dans le système actuel. Supposez deux enfants et un héritage de 36, 000 fr. Le père qui veut favoriser un de ses enfants peut lui donner 24, 000 fr. (la quotité étant alors du tiers). S’il avait huit enfants, il pourrait assurer l’un 12, 375 fr chacun des sept autres enfants aurait une part de 3, 375 fr., et la conservation du patrimoine serait impossible. Si, comme nous le demandons, la quotité disponible est portée à la moitié, dans ce même cas l’héritier-associé aura 20, 250 fr. Il pourra conserver le domaine en payant à chacun de ses frères une dot de 2, 250 fr. Il n’y a pas de proportion entre l’importance du résultat obtenu par la famille et le sacrifice pécuniaire des enfants qui n’héritent pas.
  2. De la Liberté testamentaire en France, par Maurice Hallay, page 25.