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une existence en dehors de la tradition de ses aïeux, n’inculque guère sa pratique à ses enfants il sait d’ailleurs que ses efforts ne sauraient aboutir à un résultat durable. Les jeunes gens s’inspirent surtout de l’esprit d’indépendance. Dans le choix de leur carrière, ils cèdent à leur inclination et aux impulsions fortuites du milieu social qui les entoure. Chez les nations ainsi constituées, les courtes époques de prospérité sont dues à l’ascendant momentané de quelques hommes supérieurs ; les époques de souffrance sont sans cesse ramenées par des excès d’individualisme et d’insatiables besoins de nouveauté.

Un régime intermédiaire se constitue par l’action réitérée de la famille-souche. Un des enfants, marié près des parents, vit en communauté avec eux et perpétue, avec leur concours, la tradition des ancêtres. Les autres enfants s’établissent au dehors quand ils ne préfèrent pas garder le célibat au foyer paternel. Ces émigrants peuvent à leur gré rester indépendants l’un de l’autre ou tenter en commun des entreprises, rester fidèles à la tradition ou se placer dans des situations nouvelles créées par leur propre initiative. Ce régime n’est pas toujours à l’épreuve de la corruption qui est sans cesse ramenée au sein de la prospérité par le vice originel des jeunes générations[1] ;

  1. La Réforme sociale, 4, I, et 28, III.