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préfectoral est venu fixer l’heure de la fermeture des auberges ; mais cette mesure, qui devait produire un grand bien, a eu des conséquences inattendues. En quittant l’auberge, les buveurs emportent de l’eau-de-vie, du café, du sucre, et se réunissent chez l’un d’eux ; ils font venir leurs femmes, et là, sans crainte de la police, en présence de leurs enfants, ils passent une veillée dont on ne parle qu’à demi-mot le lendemain. C’est là un grand mal, un mal qui détruit le dernier garant de la moralité des générations à venir. Des mères qui, le soir, préparaient pour le travail de la semaine les habits de la famille, prennent goût maintenant à ces réunions qu’elles déploraient jadis ; quand elles sont échauffées par la boisson, leur conversation licencieuse ne le cède en rien à celle des hommes. Ce mal ne fait que de naître, mais il se développe rapidement, et l’on se demande avec inquiétude jusqu’où il s’étendra. Autrefois encore, le dimanche, dès midi, les jeunes gens se réunissaient sur la place publique pour y danser. Au moment des offices, tous se rendaient à l’église, et le soir chacun se retirait de bonne heure. Maintenant on ne danse plus que dans des salles, où les parents ne peuvent exercer aucune surveillance. Quand les danses doivent avoir lieu en plein air, c’est-à-dire pendant les jours de la fête patronale, comme on veut imiter les habitants de la ville, on tient à