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l’accomplissement d’une complète destruction[1] avant que les derniers modèles de la régénération sociale aient disparu de notre sol[2] ! Puisse le

    l’opinion publique s’inspire, à ce sujet, d’un sentiment très juste. Beaucoup d’hommes estimés ont réclamé chez nous les révolutions sociales, mais ils ne se sont guère engagés dans les bandes noires.

  1. Dans l’Annuaire des Unions, M. Jonquières montre comment dans le Rouergue l’union de la famille et de son foyer a peine à se maintenir en présence de l’action dissolvante du Code civil. Jusqu’ici, dans l’opinion unanime de toutes les classes de la population, comme de tous les membres de chaque famille faire un oustal, faire une maison, ce n’était pas favoriser un enfant au détriment des autres, c’était maintenir pour de longues années, en vue du profit réel de tous, l’union que la nature a créée et que la mort du père ne doit pas détruire. (Ann. de 1876, ch. xiii, voir aussi : Bulletin de la Société d’économie sociale, t. V.) Histoire récente de paysans français sous le régime du Code civil, par M. Demolins.
  2. Je viens d’obtenir une vérification curieuse des faits exposés dans tous mes ouvrages, touchant l’action délétère exercée par le Code civil, surtout en ce qui concerne la petite propriété. En relisant ces jours derniers, sur l’épreuve d’imprimerie, la charmante description (§ 12, note 6) d’A. Young sur les petits propriétaires de Monein, j’ai conçu le désir de rechercher quel est, en cette localité, l’état actuel des choses. J’ai eu recours à un procédé d’enquête qui m’a toujours réussi je me suis adressé à M. le curé de Monein, bien que je n’aie point l’honneur de le connaître personnellement. Ce digne prêtre confirme toutes mes enquêtes précédentes, dans une lettre fort intéressante, du 24 juillet 1870. Selon lui, les bonnes mœurs et la prospérité signalées par l’auteur anglais se conservent encore chez beaucoup de familles-souches à domaines agglomérés, avec l’autorité paternelle, la fécondité et la transmission intégrale du domaine. Mais cette prospérité a sa source dans le passé et non dans le présent. Elle est même détruite sans relâche par le Code civil et par les influences révolutionnaires émanant des villes du voisinage. Le vénérable curé termine sa lettre par cette réflexion profondément vraie que lui suggérait l’approche d’une guerre redoutable :
    « Permettez à un prêtre qui a vécu plus de quarante ans au