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les dangers du régime institué par la Terreur. Depuis 1793, la contrainte a continué sans relâche l’œuvre de destruction ; mais elle n’a rien réorganisé. La conservation forcée des riches héritages, instituée par l’Empire et maintenue par la Restauration, a d’ailleurs été abolie par les deux gouvernements postérieurs. Le second Empire a établi un majorat en faveur d’un homme de guerre illustre ; mais il s’est heureusement arrêté dans cette voie. Le partage forcé de la Terreur, à peine adouci par les palliatifs du Consulat, est redevenu l’unique loi des familles. Aggravé dans ses effets par les exigences du fisc et par l’intervention intéressée des officiers ministériels, il soumet notre race à une instabilité dont les conséquences affectent de plus en plus la vie privée et l’ordre politique[1].

  1. Le partage forcé, qui matériellement détruit le foyer familial par ses licitations périodiques, et qui moralement substitue à l’esprit de famille l’égoïsme individuel, provoque directement la stérilité du mariage. Le lamentable arrêt de la population française a été étudié dans ses causes comme dans ses effets. « Les lois de succession, dit M. Paul Leroy-Beaulieu, peuvent entrer pour une part considérable dans la lenteur de l’accroissement de la population française. On a voulu empêcher le bourgeois, comme le paysan, de faire ce que l’on appelait jadis un aîné, c’est-à-dire d’avantager un des enfants ; on n’y a réussi qu’en partie. On peut toujours faire un aîné en supprimant les cadets ; c’est à atteindre ce beau résultat que s’ingénient une foule de familles françaises. Si des lois ont pour effet de pousser la plus grande partie de la population à n’avoir qu’un enfant par famille, il faut avouer que ces lois, pour sacro-saintes qu’on les tienne, non seulement outragent la morale, mais conspirent