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S’il t’en souvient, bénis et pleure !
Bénis ton sort, pleure le leur :
Sans cesse aux genoux du Seigneur,
Ta part, Marie, est la meilleure ! [1]
Ce monde où leur âme se perd
Et flotte à chaque vent qui change,
Que peut-il donner en échange
Au cœur insensé qui le sert ?…

Des biens, des plaisirs et des fêtes ?
— Beaux fruits tout dorés au dehors,
Mais pleins d’amertumes secrètes
Et qui ne laissent que remords… —
L’amour ? — Ô blanche tourterelle !
On dit que l’amour, c’est le ciel :
Celui de Dieu seul est fidèle.
Et tu t’enivres de son miel !

Ah ! reste, reste au cloître austère
Où, dans la chaste obscurité,
La fleur de ta virginité
S’épanouit avec mystère……
À l’ombre de ces murs pieux,
Vierge, goûte tes saintes joies,
Et, pour regarder dans nos voies,
Ne détournes jamais les yeux.

Tandis que la terre bourdonne
Sous tes pieds avec tous ses bruits,
Nourris-toi des célestes fruits
Dans le calme qui t’environne :
Douce vestale du saint lieu,
Avec les fleurs de ta prière,
Laisse tomber ta vie entière,
Comme les grains de ton rosaire,
Jour par jour dans le sein de Dieu !

Gabriel Monavon
  1. Optimam partem elegit sibi Maria, quœ non auferetur ab ea.
    Évang.