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Et l’époux dit : — « Rose fermée
Aux regards indiscrets, c’est moi !
Fleur au doux calice ouvre toi :
Ne crains rien, ô ma bien aimée !…
Cette heure divine est à nous,
Et plus que toi je la désire…
Laisse, laisse que je respire
Tous ses parfums… — j’en suis jaloux !… »

Et, pour répondre à sa tendresse,
Ton cœur, ton cœur s’épanche à flots,
Et ta lèvre n’a pas de mots
Qui puisse dire ton ivresse !…
Ton âme n’est plus qu’un soupir,
Et, dans ce moment ineffable,
Tu mourrais du poids qui t’accable,
Si le bonheur faisait mourir !

Oh ! que cette heure de délice
Te fait goûter avec ardeur
Les voluptés du sacrifice
De ta vie offerte au Seigneur !
Ô toi victime volontaire,
Qui de Jésus suivant la voix,
Choisis ses sentiers sur la terre,
Toi, qui pour couche as pris sa croix !…

Dans ta solitude profonde,
Doux nid par la paix habité,
Dis, songes-tu parfois au monde,
Au sein de ta félicité !
Colombe des saintes montagnes,
Quand vers le ciel tu prends l’essor,
Te souvient-il de tes compagnes
Qui dans nos bois restent encor ?…