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Et déja dans ſon cœur Tithon a concerté
L’ingénieux ſecret de fléchir la Déeſſe.

Vous m’aimerez toujours, dit-il, votre tendreſſe
Remplira ma félicité ;
Mais quand vous ne craignez pour moi que la vieilleſſe,
Mon cœur plus délicat prévoit les plus grands maux ;
Car enfin ſi le ſort qui me rend la jeuneſſe
M’en avoit donné les défauts ;
S’il rue forçoit d’être volage,
Votre beauté vous répond de mon cœur :
Mais je n’ai que vingt ans, à ce dangereux âge
De la confiance, hélas ! connoît-on le bonheur ?
Aſſurons, croyez-moi, le ſort de notre flâme,
Je le ſens bien, un luſtre à mon âge ajouté,

Suffira pour bannir à jamais de mon ame
Ces goûts capricieux, cette legéreté
Que la jeuneſſie embraſſe avec tant d’imprudence.
Eh ! quoi voudriez-vous, charmante Déité,
Faute d’un peu de prévoyance
Expoſer ma fidélité ?

Ô divine raiſon, que ta voix eſt puiſſante,
La Déefie ſe rend, & comment réſiſter ?
Déja ſon ame impatiente
De ſes conſeils brûle de profiter.

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