N’êtes-vous pas contrit ? Si je le ſuis, mon pere,
Ah ! je ne puis aſſez gémir de ma miſere !
Allons, tels ſentimens montrent un vrai retour,
Parlez donc : dites-moi vos fautes ſans détour,
Et n’oubliez ſur-tout aucune circonſtance,
la façon de pécher décide de l’offenſe.
Continuez. Hélas ! mon pere, une beauté
Que le hazard m’offrit, & dont je fus tenté,
Me fit perdre en un jour toute mon innocence ;
Je l’aimai, je la vis avec toute licence,
Et l’Amour, dans ſes bras, au fonds d’un Cabinet.
Je vous entends : ſon nom ? on l’appelle Bonnet.
Bonnet ? je la connois : comment donc adultere !
Ah ! mon fils, redoutez la céleſte colere !
Mais voyons que devint ce commerce odieux :
Mon Pere, il fut ſuivi d’un plus délicieux :
Une jeune Bonnet, tendre, vive, gentille…
Oh ! oh ! voici bien pis : quoi ! la mere & la fille !
Cette jeune beauté, ſource de mes plaiſirs,
Devint bien-tôt, pour moi, l’objet de mes deſirs.
Ah ! quel déſordre affreux ! l’inceſte, l’adultere !
Mon Pere, ſuſpendez votre juſte colere :
Je ne viens point ici vous prôner mes vertus.
Et tout ce que j’ai dit n’eſt encor que bibus.
Apprenez que Bonnet, chef de cette famille,
Succéda dans mon lit à ſa femme, à ſa fille,
Et que ſon fils enfin y prit place à ſon tour.
Page:Le Parnasse libertin ou Recueil de poésies libres, BnF Enfer-729, 1769.djvu/49
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