Page:Le Parnasse libertin ou Recueil de poésies libres, BnF Enfer-729, 1769.djvu/15

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 15 )

Je penſe que l’on peut ſe dire homme ſans honte.

Huit fois, ſi j’ai ſçu bien compter,
Dit l’épouſe, il eſt vrai, vous avez pris la peine,
De me payer le droit d’Aubaine,
Voilà bien de quoi vous vanter !
Demandez à Cloris, à Flore, à Celimene,
Leurs trois maris à moins d’une double douzaine,
N’ont jamais cru les contenter ;
Je les vaux bien, ne vous déplaiſe,
Et je ne fuis pas aſſez niaiſe
Pour croire ſuffiſant un nombre ſi chétif :
On ne vient pas, Monſieur, à bout d’un pucelage
Avec auſſi peu de courage ;
Il faut pour le dompter un vainqueur plus actif.

Par St Jean, qu’eſt ceci ? dit la mere ébaubie,
À quel prix mets-tu tes appas !…
Tu crois avoir encor… la plaiſante folie !…
La fleur que par huit fois ton mari ta ravie :
Deux Carmes ne ſuffiroient pas
À ſatisfaire ton envie.

Sans doute quelque eſprit badin
T’a fait du pouvoir maſculin
Une hyperbole magnifique.
Il te faudra bien décompter,
Tu l’apprendras par la pratique,
Crois-tu dans tes calculs jamais ne t’arrêter ?
Bien-tôt tu te verras réduite à ſouhaiter