Page:Le Parnasse contemporain, III.djvu/67

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


AURORE


La glèbe, à son réveil, verte et toute mouillée,
Vaste, étendue autour d’une épaisse feuillée
Où des toits assourdis fument tranquillement,
Dans la plaine aux soyeux replis que rien ne cerne,
Parmi les lins d’azur, l’œillette et la luzerne,
Berce les jeunes blés pleins de frissonnement.

Sereine et rafraîchie aux brumes dilatées,
Sous l’humide baiser de leurs traînes lactées,
Elle semble frémir dans l’ivresse des pleurs
Et, ceinte des trésors dont son flanc large abonde,
Sourire à l’éternel époux qui la féconde,
Au grand soleil qui sort, vibrant, d’un lit de fleurs.

L’astre vermeil ruisselle en sa gerbe éclatante :
Chaque fleur alanguie aux lenteurs de l’attente,
Voluptueusement, vers le foyer du jour
Tourne sa tige, tend son avide calice
Et boit ton charme, Aurore, et rougit de délice…
Et le germe tressaille aux chauds rayons d’amour.

Courrières, juillet 1875.