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Toi cependant, Cosette, ô ma chienne, ô ma fille !
Dans les champs où la vie excessive fourmille,
Tu lanceras au ciel tes aboîments joyeux.




A ALEXANDRE DE BERNAY


Mon vieux compatriote, on t’oublie. On déterre,
Chaque jour, dans le fond de quelque monastère,
Un rimeur enfoui sous l’herbe & les plâtras ;
On ressoude ses vers mutilés par les rats,
On leur remet des pieds ; on les commente, on glose ;
Un savant les encadre au milieu de sa prose ;
Puis, un matin, Jehan Tournebrousche renaît !
On en parle, on le cite, & son moindre sonnet
S’enfonce comme un coin dans toutes les mémoires.
Et toi, mon Alexandre, hélas ! quelles armoires
Dérobent tes chefs-d’œuvre à l’admiration
D’Asselineau chagrin ? O sombre question !
Tous les morts oubliés s’en viennent à la file
Réclamer leur soleil chez le bibliophile.
Et toi, brave homme, toi, couché tranquillement
Sous le gazon épais du bon pays normand,
Tu laisses en avril croître la violette
Et les frais liserons auprès de ton squelette,
Sans jamais demander si monsieur Taschereau
Prit soin de te coller au dos un numéro !