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Et que l’effort le plus énorme serait vain,
Et puisque c’en est fait, même de notre haine,

Nous n’avons plus, à l’heure où tombera la nuit,
Abjurant tout risible espoir de funérailles,
Qu’à nous laisser mourir obscurément, sans bruit,
Comme il sied aux vaincus des suprêmes batailles.

— … Une faible lueur palpite à l’horizon,
Et le vent glacial qui se lève redresse
La cime des forêts & les fleurs du gazon,
C’est l’aube ! Tout renaît sous sa froide caresse.

De fauve, l’Orient devient rose, & l’argent
Des astres va bleuir dans l’azur qui se dore ;
Le coq chante, veilleur exact & diligent,
L’alouette a volé stridente : c’est l’aurore !

Éclatant, le soleil surgit : c’est le matin,
Amis, c’est le matin splendide dont la joie
Heurte ainsi notre lourd sommeil, & le festin
Horrible des oiseaux & des fauves de proie.

O prodige ! en nos cœurs le frisson radieux
Met, à travers l’éclat subit de nos cuirasses,
Avec un violent désir de mourir mieux,
La colère & l’orgueil anciens des bonnes races.

Allons, debout, allons, allons, debout, debout !
Assez comme cela de hontes & de trêves !