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Il faut parfois, afin qu’on la tire d’un coup,
Que l’idée apparaisse et passe par un bout ;
Si l’idée, au fourreau du vers emprisonnée,
Est une épée, il faut qu’elle ait une poignée !
Donc, les portiers pourront couper la queue aux chats ;
Mais toi, riant enfin du but que tu cherchas,
Laisse flotter les plis des strophes débordées,
Et ne coupe jamais les franges des idées.
Romps ces compartiments et ces étroits barreaux
Qui ne distinguent pas les aigles des pierrots,
Et, jetant ton ciseau mortel à ce qu’il taille,
Laisse voler en toi des vers de toute taille,
Entrecroisés ainsi que dans un vol réel.
Ta forme est une cage et devrait être un ciel !
Varie en chacun d’eux les lois universelles.
Pas de rejet ? alors tu hais les étincelles ?




A UN ENFANT MORT


Tu vivais tant ! Toujours dans le bois qui t’invite,
Et jamais fatigué, haïssant de t’asseoir,
On avait tant de peine à t’endormir le soir,
Et ton sommeil d’oiseau se réveillait si vite !

Tes nuits s’inquiétaient d’une haleine de l’air,
Comme un canot tressaille encore dans la crique ;
Chargé de vie hélas ! ton repos électrique
Laissait à tes yeux clos trembler un vague éclair.