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A VÉNUS DE MILO


(STATUETTE)




O Vénus de Milo ! ma chère statuette,
Seul reste d’un amour comme toi mutilé,
Mon cœur, mon pauvre cœur, qui souffre et qui regrette,
En ces strophes t’adresse un soupir désolé ;

Je crois que tu dois bien comprendre ma tristesse,
O chef-d’œuvre incomplet ! — comme tout ici-bas. —
Où puis-je mieux pleurer, poëte sans maîtresse,
Que sur le sein meurtri de la Vénus sans bras ?…

Hélas ! tu l’as connue avant moi. — Dans sa chambre
Pour la première fois quand j’entrai si joyeux,
C’était, — t’en souvient-il, — l’an dernier, en décembre,
Après elle, sur toi s’arrêtèrent mes yeux.

Pressentais-je déjà qu’un jour viendrait où d’elle
Et de ce grand amour qui ne devait finir,
Toi seule resterais, témoin cher et fidèle
Et muet souvenir ?…