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JÉRUSALEM


Quand sous son déïcide et Titus en fureur,
Jérusalem maudite eut fermé sa paupière,
Sans que du temple saint restât pierre sur pierre,
Le corps seul succomba, trop juste objet d’horreur.

Mais d’une autre existence un souffle avant-coureur,
L’âme se dégagea de cette immense bière.
La nouvelle Sion put revivre en saint Pierre ;
Le Pape enfin bénit tonnait l’Empereur.

Ainsi, dès que chez nous sera mort le vieil homme,
De la Jérusalem notre âme ira vers Rome,
La matière à l’Idée et la lettre à l’Esprit,

Car, pour chaque mortel, autant que pour le monde,
L’âge vient où chassant tout alliage immonde ;
Dans l’or pur de son nimbe apparaît Jésus-Christ.




ROME


Quand la Rome d’orgie, après le moindre choc,
Tombait de pourriture, ayant au cœur son chancre,
Ou comme un vieux vaisseau, désarmé de son ancre,
Sur une mer de sang sombrait de roc en roc ;

Guettant mourir la ville, enfoui sous son froc,
Un sale Juif, avec ses maigres doigts de cancre,
Mêlait, broyait le fiel et la fange au lieu d’encre,
Pour insulter la Reine et du glaive et du soc.