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LASSITUDE




La pensée a des jours ineffablement calmes,
Où la gloire effraierait comme un vice ; où les palmes,
Où les bravos, où tout appareil de grandeur
Déconcertent le goût et blessent la pudeur.
On vit, on est content de vivre ! Les plans vastes
Sont bien loin ! On est las de chercher des contrastes :
Et l’on accorde au cœur trop longtemps tourmenté
Les plaisirs endormeurs de l’uniformité.
Alors, sur le chemin banal si l’on coudoie
Un camarade ancien, et s’il voit cette joie
Sans chaleur, sans rayon, qui ressemble à l’ennui,
Il se sent tout glacé quand il rentre chez lui !
Si le nom d’un héros alors monte à la lèvre,
Ce n’est pas Bonaparte ou Dante ; c’est Penthièvre,
Ou Rollin, ou plutôt, dans un bourg ignoré,
Quelque vieux pédagogue ou quelque doux curé !
Plus de roman, plus d’ode ardente ; plus de livre
Où la verve possède, où la parole enivre ;