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Dont les naïvetés superbes et cyniques
Provoquent hardiment les voluptés physiques.
J’aime à voir haleter sa guimpe, se gonflant
Sur la double rondeur de son sein insolent
Qui semble défier la lèvre qu’il attire,
Et de qui les contours nubiles, qu’on admire,
Brusquement quelquefois se dessinent aux yeux,
Puis courent s’engloutir dans de grands plis soyeux.

Oui ! sa beauté charnelle est un sacré cantique
Dont j’admire en rêvant l’harmonie emphatique,
Car il sied qu’en dépit de ce siècle hébété
La femme ose être belle avec solennité,
Et que la Forme, autour de sa gloire divine,
Ameute en souriant la tourbe philistine.

Donc, vraiment, je t’admire, ô vierge ! et j’aime à voir
Que ta beauté sereine a compris son devoir,
Car la beauté n’échoit aux femmes de ta race
Que pour glorifier sa splendeur et sa grâce.
L’orgueil est la vertu des heureux et des forts :
On a toujours le temps d’être humble auprès des morts,
Et c’est faire une injure aux dons de la matière
Que ne point les porter d’une façon altière !


II


Ainsi — naïveté que j’ose confesser ! —
Au milieu de ce siècle un homme a pu penser
Qu’une vierge de marbre et sculptée à l’antique
Acceptait dignement sa mission plastique.
J’eus cette illusion — bien folle en vérité —
Qu’en un corps virginal incarnant sa fierté,
Et jetant ses défis à nos pudeurs moroses,
L’art daignait traverser le désert de nos proses.