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LA MONTAGNE D’HIVER

Les hauts conifères donnaient un air de fête à la route. Des skieurs allaient et venaient en bordure, et la coupole transparente du ciel était de nouveau comme un globe de verre, protégeant la magie du spectacle. Les arbres sans feuilles gardaient du dernier dégel une parure glacée où jouaient les couleurs du prisme. Le village dépassé, les bois transformés par ce cristal se multiplièrent. Minces et jeunes bouleaux, touffes de gros sorbiers parmi les pins et les épinettes couverts de verglas, composaient un monde mystérieux qui donnait au chemin rétréci, l’air de conduire au pays des fées.

Mais ce chemin déboucha au sommet d’une côte dominant la vallée. Ils revirent en bas le boulevard laurentien animé du mouvement des autos. La carriole réussit à le traverser, pour fuir vers Mont Rolland, dans une pente qui plongeait jusqu’à la Rivière du Nord. Les vigoureux courants de l’eau contrariée dans sa course, s’enroulaient autour d’énormes rocs couverts de neige, dont la blancheur contrastait avec le noir du flot que, plus loin, la glace recouvrait.

— Je suis venue jusqu’ici, à pied, avec Louise, à l’automne.

— Aller et retour ?

— Non. Pour revenir, nous avons fait un tour en train qui a duré dix minutes et nous a coûté dix cents !

La carriole regagna Sainte-Adèle. La faim commençait à les tourmenter. Ils acceptèrent avec moins de regret la perspective de rentrer.

Les Martin firent visiter leur domaine. Deux pièces qui formaient l’angle de l’hôtel du côté de la montagne. Deux des fenêtres encadraient une forêt apparemment profonde.