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LA MONTAGNE D’HIVER

Avec tout cela, elle avait encore bougé. Malgré la planchette, le lien, l’aiguille s’était une fois de plus dégagée. La religieuse se penchait.

— Alors, je ne suis pas morte ?

— Et vous ne mourrez pas.

— Pas tout de suite, mais un peu plus tard.

Vivre, sans être malade, cela irait, mais vivre malade, même avec un miracle comme Marie pour la soigner, ce n’était guère fameux. Elle refusait d’y réfléchir, elle referma les yeux, préférant retourner au néant provisoire.

Auparavant, elle fit l’effort de sourire à la religieuse, aux infirmières, comme pour les rassurer.

— Rien ne me fait mal. Ce n’est pas si terrible. Même le tube dans le nez.

— Et vous en avez deux autres !

— Deux autres. Une vraie pieuvre, alors !

Elle s’était rendormie. Elle se sentait heureuse et jeune, comme dans les bras de quelqu’un qui l’aimait.

Le lendemain, elle découvrait sa faiblesse et les malaises et les douleurs, et tout ce qui devait précéder la guérison.

Un souvenir attendri survivait cependant à tout cela : de l’hôpital, de certaines douceurs, de l’amitié qu’elle avait éprouvée pour des infirmières dont, étrangement, elle avait complètement depuis oublié les visages et les noms.

C’était le printemps, mais uniquement sur le calendrier. Le temps se maintenait maussade et froid. Louise se sentait souvent contente d’être à l’abri des obligations et des tempêtes. Chaque matin, à sept heures, une jeune religieuse entrait dans sa chambre avec le même sourire joyeux. Il pleuvait, il ventait, il neigeait en plein avril, et tout semblait pour elle plaisir de vivre.