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LA MONTAGNE D’HIVER

Hélène eut une expression désespérée. Madeleine devenait folle, il n’y avait plus à en douter. Mais celle-ci continua :

— Il m’apporte une solution au terrible problème que je représente pour vous tous. Je vais aller me réfugier chez Louise Janson, aux Escarpements. Elle accepte des hôtes payants. J’irai et je resterai là, tant qu’elle pourra me garder. Léon et toi, vous dormirez plus tranquilles. Tout le monde oubliera le drame de ma vie brisée. Si quelqu’un peut m’aider à reprendre mon équilibre, c’est Louise.

Hélène feignit ne pas remarquer ce qu’il y avait encore d’amertume dans le ton :

— Ton idée est épatante. Louise est si gaie. Je me demande même comment elle réussit à l’être. Elle qui n’a eu que des malheurs dans sa vie !

— Pourquoi n’ai-je pas songé à elle plus tôt, murmura Madeleine.

Depuis la mort de Jean, elle n’avait pas une seule fois exprimé sa pensée avec autant de vigueur. Hélène respira plus à l’aise ; enfin, un projet et un projet sensé. La solitude relative des Laurentides ne serait pas triste. Si Madeleine désirait ce costume, c’était qu’elle consentait à sortir de sa torpeur et désirait aussi s’adonner à son sport favori. Léon serait enchanté d’une décision aussi saine.

Le costume fut essayé et acheté en cinq minutes.

— Maintenant, allons aux robes, déclara Hélène avec une énergie renouvelée.

— En ai-je besoin ? pour aller vivre aux Escarpements ?

— Madeleine ! s’écria Hélène en riant cette fois, je t’enlève immédiatement celle que je t’ai donnée, et devant tout le monde, si tu ne consens pas à t’en choisir au moins une autre. Et n’oublions pas l’écharpe. Si tu te voyais, avec ton grand cou nu…