Page:Le Normand - La Montagne d'hiver, 1961.djvu/127

Cette page a été validée par deux contributeurs.


— VII —


Au village, la neige allait disparaître tout à fait. L’eau coulait au bord des trottoirs ; les enfants, la figure brûlée par le soleil, rejetaient leurs capuchons et couraient tête nue. Les érables étaient entaillés, les vacances de Pâques bientôt commenceraient. Louise Janson, sur la bande de terre découverte près de la maison, guettait avec inquiétude les pousses trop précoces de ses tulipes. Chaque soir, redoutant le froid cruel de certaines nuits de mars, elle leur mettait des bonnets de papier.

Cependant, sur La Solitaire, de nombreux skieurs prolongeaient le grand jeu. Madeleine en était tous les matins. Mais la joie du ski n’abolissait plus pour elle l’avenir. Elle ressentait la même impression qu’autrefois, lorsque les vacances finissaient : les derniers jours étaient moins heureux, parce qu’ils étaient les derniers jours. L’inexorable fuite d’un temps qui avait été merveilleux, l’attristait malgré elle. Dans les yeux noirs de la jeune femme, Louise surprenait parfois une farouche lueur. Le fruit d’un si bel hiver serait-il perdu ? Le serait-il surtout pour Maryse, que rien, apparemment, ne changerait jamais ?