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LA MONTAGNE D’HIVER

même un seul enfant. Moi, j’ai décidé d’une chose. Je tenterai de devenir propriétaire au plus vite, de construire des maisons, et en ma qualité d’architecte, j’orienterai les plans vers des appartements commodes pour des familles. Quand ma première maison de rapport sera terminée, je me payerai le luxe de l’annoncer en gros caractères dans le…, Star, où nos bons Canadiens français cherchent toujours ce dont ils ont besoin ! Et mon annonce, savez-vous comment elle sera conçue ? « Logements à louer uniquement à des familles ayant plusieurs enfants. »

Tout en développant ses beaux projets il mangeait avec appétit. Sa jeunesse émouvait Madeleine. Ils ouvrirent la bouteille Thermos, et avalèrent leur café. Puis, Georges s’étendit de tout son long, sur le moelleux matelas de neige, sous prétexte qu’il ne fallait pas faire tout de suite un exercice violent, comme celui de remonter au sommet. Il avait trop mangé. Et comme c’était agréable de se laisser brûler la figure.

— Les gens de la ville ne me croiront pas, quand je leur dirai qu’ici le soleil brûle, en hiver.

Quand ils se furent bien reposés, et que Georges eut beaucoup parlé, ils décidèrent de ne point se rendre jusqu’à Sun Valley. Cette vaste côte, face au soleil, était merveilleuse, sans vent, et si neuve. Ils la redescendirent, la remontèrent, Georges achevant d’énumérer ses plans d’avenir, et oubliant l’effort qu’il devait faire. Partant du sommet, ils traçaient de beaux virages dans la neige neuve, et des arabesques et des lignes parallèles. Leurs skis, lorsqu’ils laissaient finalement la vitesse les emporter, soulevaient à leurs pointes une gerbe poudreuse, comme celles que Madeleine admirait quand au cinéma, elle voyait des films d’hiver.