Page:Le Normand - La Maison aux phlox, 1941.djvu/155

Cette page a été validée par deux contributeurs.
AUX PHLOX
[155]


Israël

De l’Anse-aux-Canards, tous les matins il nous arrive, depuis que les bleuets sont murs. Il est maigre et mal vêtu, — à peine vêtu, plutôt, à travers les trous de son chandail ! — sa peau est brunie par l’air, ses cheveux roussis par le soleil.

Au premier abord, nous n’avons vu en lui qu’un enfant malingre, parmi d’autres aussi miséreux. Puis, nous avons regardé ses yeux bien coupés, couleur de mer, ses cils noirs, ses sourcils fins, son nez délicat. Et nous avons dit après son départ :

— Mais il est beau, cet enfant, et il est intelligent !

Car, si jeune, il avait tout de même su nous arracher la promesse de l’attendre pour acheter des bleuets, de ne jamais en prendre de personne d’autre…

Pourtant, Dieu et nous, savons s’il en passe, des petits vendeurs, et de bon matin ! Ils commen-