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le carême d’isabelle

gentil, bien élevé, je te laisse jouer avec lui parce que c’est un bon petit voisin, mais c’est bien entendu, Isabelle, que s’il continue à te faire des déclarations, il va falloir lui faire la leçon. Il pourrait finir par vouloir t’embrasser, et là, il ne faudrait pas le laisser faire, et vous n’auriez plus la permission d’être toujours ensemble…

— Ah ! je sais bien, maman. Et ce n’est pas comme ça qu’il m’aime, maman, ce n’est pas de l’amour comme papa et toi, on est des enfants, on n’est pas fou, on le sait… Mais il me trouve belle, qu’est-ce que tu veux ! Pense donc, plus belle que Deanna Durbin, Deanna Durbin ! Pense donc !

Et le sourire de béatitude reparut.

Mais en effet, si Jean suivait Isabelle comme une ombre, s’il la dévorait des yeux pendant qu’elle parlait, aucun n’était plus correct, plus respectueux. C’était, en fait, de la vénération. Ils revenaient toujours de la classe se tenant par la main, mais au beau milieu de la rue et entourés de leurs camarades qui parlaient tous ensemble.

Six semaines plus tard, cependant, imprévu, survint le drame.

Les petites filles étaient, ce midi-là, sorties plus tôt de l’école et Isabelle revenait avec ses compagnes, quand, en arrière, parut Jean avec quelques écoliers. Leur montra-t-il de loin Isabelle en disant :

« C’est ma blonde », ou, si d’eux-mêmes, ils avaient tiré leurs conclusions ? Toujours est-il que