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enthousiasme

tier s’en contente. Elle s’en prend vingt balles, attrape une vendeuse qu’elle connaît et dit :

— C’est pour mettre à mon compte et envoyer.

Elle donne son nom, son adresse, se hâte, et quand elle se retourne, elle voit qu’un peloton de femmes s’est détaché de la grande table et s’est jeté sur les boîtes qu’elle a découvertes et les vide.

Une vendeuse dit : « Mon Dieu, c’était la réserve ! »

Mais il n’y a pas à protester, le mal est fait. Il faut tout laisser partir. Dix futures mamans la supplient. Et après tout… c’était pour vendre.

Ouf ! Elles se sentent dépeignées, froissées, les deux amies d’occasion, mais elles ont obtenu ce qu’elles désiraient. Linette veut aller se refaire une beauté au salon des dames. L’autre aussi. Une fois devant les miroirs et les lavabos, autant aller ailleurs aussi. Encore une fois, elles s’offrent mutuellement de tenir les bourses…

Linette attend poliment que l’autre, à son tour, sorte de la cabine. Et c’est alors que se produit le drame.

En éclair, pendant que l’autre est enfermée, lui revient la prédiction de son mari : « Tu finiras par avoir des mésaventures ». Elle pense soudain qu’elle a laissé une parfaite étrangère tenir sa bourse tout l’avant-midi, sa bourse où il y avait un vingt dollars tout neuf fiché sur le dessus, — elle ne se rappelle même pas où elle l’a mis, — et beaucoup de monnaie. Elle ouvre vite son sac, elle ne voit plus le gros billet. Elle ouvre la bourse