Elle l’embrasse en passant, lui tire les oreilles, lui secoue les cheveux et disparaît en coup de vent.
Dix minutes après, il la retrouve dans la salle à déjeuner. Le café sent bon. Le pain est en train de griller, et il sent un peu trop bon, il brûle. Il le sauve du désastre, ils se mettent à table, et elle lui raconte ses projets.
— Ne téléphone pas à midi. Personne ne répondra. Je dîne en ville avec Jeanne. Je vais d’abord à la laine, puis je la rencontre aux Délices, et nous remontons ici de bonne heure pour commencer à tricoter.
— Ton vingt dollars de laine…
— Tu sais bien que je n’en achèterai pas tant que ça…
— Alors, pourquoi vingt dollars ?
— Pour mon bas de laine, ce n’est pas la même chose…, mon bas de laine, mon compte de banque si tu veux…
— ?
— Oui, la vente, c’est le prétexte. J’ai une amie qui m’a éduquée, avant mon mariage. Elle m’a dit : « Ne refuse jamais un cadeau de ton mari, même s’il t’en fait, quand il n’en a vraiment pas les moyens ». Puis, elle m’a dit : « Demande-lui de l’argent, chaque fois que tu auras un prétexte, et demande-lui-en trop ». Elle a ajouté : « Les hommes ne connaissent pas ça, et c’est quand ils sont jeunes mariés qu’il faut les entraîner à être généreux ». Oui, et elle m’a recommandé de me faire une réserve avec les surplus, et que tu serais le premier plus tard à me remercier, parce que, dans les mauvais jours,