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Je reprends. Nous fîmes profession ma compagne et moi, et fûmes agrégées à la société avec toutes les particularités que j’ai détaillés. Mon bon ami fut fait Procureur de sa maison ; pour obliger Sylvie, il fit nommer Vernier pour son celerier ; ils se fixerent ainsi au Prieuré qui étoit proche de l’Abbaye, et nous fûmes à même d’avoir très-souvent leurs visites. Mais mon amour pour Dom Delabrisse s’accrut de telle sorte, que je regardois les faveurs que j’accordois aux autres, comme autant d’infidélités que je lui faisois. La crainte de le perdre m’allarmoit aussi ; il peut, disois-je, par la difficulté de contenter tout le monde, se faire des ennemis, être même supplanté, pour surcroît, et par le plus grand des malheurs, on peut l’éloigner à cent lieues de moi. J’y succomberai continuai-je ; Sylvie qui est remplie de sentimens, me tenoit le même langage du sien ; nous nous assistions alternativement de nos conseils ; mais nous ne savions pas ce que ces chers hommes préméditoient, et le sort qui nous attendoit.

Le chagrin que ma Bonne conçut de l’éloignement de son amant, qui fut nommé à une Cure, à cinquante lieues de l’Abbaye redoubla mes craintes : je fus pendant près de