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longue : les deux filles se mirent à ses trousses, et métamorphoserent bientôt le gougeon en lausseron[1]. La suivante voyant que ses soins étoient inutiles, étendit une couverture sur le plancher, fit signe à la Fleur, et tous les deux dessus, pour amuser leurs maîtres, jouerent pendant un moment le Romina grobis : notre fille au nez retroussé, pinçoit, mordoit, égratignoit, tandis que son jeune matou la tenant sous lui, sembloit faire son possible pour l’enfiler. Ma sœur et son amant, très-attentifs à ce qui se passoit, en riant s’agassoient aussi : le désordre dans lequel étoit son ajustement la rendoit encore plus piquante, et lorsqu’elle vit que son espiégle, un peu plus traitable, appuyé sur ses quatre pattes, se laissoit lancer, elle tourna lestement la médaille, et se fit caresser de la même maniere. Après cette farce je délogeai.

Voilà, ma Bonne, ce que j’ai vu ; j’ai cru ne devoir omettre aucune circonstance touchant cette entrevue, afin de vous en rendre le récit plus amusant. Je compte avoir le bonheur de vous rejoindre bientôt, reprendre mon appartement, et ne plus me séparer de vous. Ma premiere lettre vous annoncera le jour de mon départ, et celui de mon arrivée.

  1. Mot ne figurant pas dans les dictionnaires. Apparemment une sorte de petit poisson du genre brochet, cf. Bulletin de la société d’histoire de Normandie, 1888, p. 254, ligne 2 : Internet Archive. (Note de Wikisource).