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le lyon de nos pères

tavernes et guinguettes, entourées de jardinets et de vergers. Tout un peuple d’artisans et d’ouvriers y accourait les dimanches et jours de fêtes ; il s’y faisait maintes beuveries ; pendant la belle saison, l’on dinait sous les saulées, dans les prairies voisines, qui, pendant les foires, se couvraient de troupeaux de bœufs, de pores et de moutons ; puis on envahissait la grande ile de Plantigny — le « broteau de la ville » — qui s’étendait aux pieds du pont, et là, sous les grands arbres, comme l’avaient fait leurs aïeux dès le xive siècle, au temps où Guillot donnait à boire dans sa grange du bord du Rhône, filles et garçons dansaient des branles, au son de la musette, jusqu’à ce que la nuit fût venue et que la cloche donnât le signal de la fermeture des portes de la ville :

Liaudo, pren don ton instrument,
Guillaumo, ta museta.
Grou Guillot, pren ta museta,
Et tuy ton obois, Michi :
Not danseran à la feta,
J’ay mon tambor per tochi.

C’était dans ce même « broteau » que, longtemps avant que le pont Morand fit communiquer la ville avec les prairies des Broteaux actuels, la jeunesse lyonnaise dansait le rigodon, en chantant le couplet populaire :

Allons au broteau…

Chaque année, au premier dimanche de mai, le tir du papegay, par la Compagnie des Archers de l’arc en main, amenait aussi une foule nombreuse de spectateurs dans une prairie située en face du Grand-Hôpital (à peu près vers la Préfecture actuelle) ; le Consulat était invité à la fête et un échevin faisait l’ouverture du prix, qui était toujours payé des deniers de la ville ; l’adroit tireur qui abattait l’oiseau de bois attaché au sommet de l’arbre était proclamé roi. Enfin, non loin de là, était